





Quiconque ayant vécu sa jeunesse dans les années 80 dans la province de Québec sait pertinemment qu’un samedi matin d’hiver ne rime qu’avec une seule chose : les petits bonhommes animés à la télévision.
Combien de litres de Map-O-Spread étendu sur des toasts de pain blanc se sont dévorées devant les aventures haletantes des Ulysse-31, Albator et autres Capitaine Flam de ce monde?
Parce qu’il faut tenir compte du fait qu’à cette époque, il n’y avait pas de chaînes spécialisées en émissions pour enfants… Pire, il n’y avait même pas de chaînes spécialisées tout court.
Il n’y avait pas non plus Internet et Youtube. Il n’y avait pas de services de streaming comme Netflix, Disney+ et Crave. Il y avait bien Super Écran, alors connu sous les noms Premier Choix et TVEC, mais peu de gens y étaient abonnés.
Il fallait donc attendre le samedi matin pour pouvoir regarder des dessins animés. Et il y en avait pour tous les goûts et tous les genres. Parce qu’à cette époque, tout était genré! La plupart des émissions, pour ne pas dire la totalité, était issue des studios d’animation japonais. Donc tout se ressemblait pas mal.
Parmi les émissions diffusées à cette époque, on peut avancer sans trop avoir peur de se tromper que les scénaristes prenaient un malin plaisir à rendre les enfants tristes…
Par exemple, il y avait Demetan, un genre de grenouille laide qui était toujours triste, les yeux remplis d’eau. Une émission de pleurage qui faisait l’effet d’une dépression nerveuse chez tous les enfants. D’ailleurs, l’auteur de ces lignes a craint les tritons toute sa jeunesse à cause de Demetan. Et il ignore ce qu’est un triton encore aujourd’hui.
Et il y avait Remi sans famille, un pauvre orphelin abandonné. Juste dans le générique, on entendait la phrase « Je suis sans famille » au moins un million de fois, si ce n’est pas davantage. L’histoire était horrible : un enfant orphelin de huit ans, vendu par son père adoptif à un forain, qui parcourt Paris à la recherche de sa mère en compagnie de trois chiens et un singe.
Les orphelins représentaient un sujet de prédilection il faut croire, puisqu’on pourrait en nommer plusieurs autres, comme Belle et Sébastien, l’histoire d’un gros chien et d’un enfant de six ans dont la mère était morte en le mettant au monde. Il y avait aussi une version pour filles, puisqu’on l’a dit précédemment, les émissions étaient genrées à l’époque. Heidi c’est l’histoire d’une orpheline de sept ans, élevée par un vieil ermite vivant dans les Alpes. Heidi est arrachée à son bonhomme adoptif et se retrouve à apprendre les bonnes manières avec une belle-mère folle comme braque. Encore une histoire à pleurer des rivières de larmes.
Les dessins animés des années 80 étaient parfois très étranges, comme la série Le Merveilleux Voyage de Nils Holgersson au pays des oies sauvages, dont le titre sonnait pas mal plus comme une émission de chasse à RDS2. C’était l’histoire d’un ado débile de 14 ans avec un gros problème de comportement qui maltraitait des animaux pour s’amuser… Après avoir fait suer un lutin, il s’est fait jeter un sort de miniaturisation et pour renverser le sortilège, il doit parcourir la Suède à la recherche du lutin sur le dos d’une oie domestique dans un voilier d’oies sauvages… C’est vraiment pas attirant comme scénario…
Le samedi matin, il y avait aussi Capitaine Flam, un espèce de héros de l’espace avec une trame de fond de biologie moléculaire… Le Quick aux fraises goûtait encore « plus meilleur » avec de la biologie moléculaire. Et que dire des aventures du Petit Castor? Qui devait contrecarrer les plans d’un trio formé d’un loup, un renard et un ours. Au fait, sans surprise, il était orphelin de mère.
Ulysse 31 et Albator était une autre paire d’émissions un peu fuckées. Ulysse 31 mélangeait les mythes grecs sur une base spatiale, avec des dieux pis toute… Tandis qu’Albator, le corsaire de l’espace, se promenait dans la galaxie à bord d’un bateau à voile pour trouver des denrées à ramener sur Terre, pendant que des dirigeants abrutissent les habitants de la planète via la télévision. Comme TVA genre!
L’émission la plus célèbre de cette époque aujourd’hui lointaine est fort probablement Les mystérieuses cités d’or. Une trame narrative qui prend naissance en 1532 avec en vedette Esteban, un autre orphelin (tiens donc) qui quitte l’Espagne avec un marin du nom de Mendoza, qui veut trouver les cités d’or pour s’enrichir. Dans le générique, on voyait un genre d’avion en forme de grand condor doré… Mais il fallait attendre l’épisode 17 pour enfin voir le maudit condor… La seule chose vraiment cool dans cette série à bien y penser.
Habituellement, les gars fermaient la télé quand Candy commençait. Candy était, oh surprise, une orpheline… Pis c’était ben ben triste!
Plusieurs autres émissions ont été diffusées les samedi matin. Mais les plus marquantes demeurent celles mentionnées plus haut.
Soudainement, une chaîne spécialisée d’émissions pour enfants a fait son apparition et c’est là que la magie des séries animées du samedi matin s’est évaporée… Tout comme l’envie de manger du Map-O-Spread.
Encore aujourd’hui, la majorité des gens qui ont eu la chance de vivre cette époque sont capables de chanter les paroles des génériques d’ouverture de ces émissions du passé…