Et si : la conquête des Plaines d’Abraham
« J’étais Samuel de Champlain. En 2019, je ne porte plus ce nom, évidemment. Je me suis fondu dans le peuple. Les rares contacts que j’entretiens avec les mortels ne sont que de nature protocolaire. Pour ce qui est de la logistique de la guerre secrète, je laisse mes subalternes vaquer à ces choses-là. Je ne fais plus dans ces apparitions théâtrales et sinistres, m’immisçant dans les salons feutrés de la haute société pour rappeler à ces assoiffés de sensations que moi seul détenais pouvoir de vie ou de mort sur leurs misérables existences. Tout cela ne m’attire plus guère. Les temps modernes m’ont obligé à évoluer sur un autre plateau de l’échiquier. »
Grimoire de la Nuit, Samuel de Champlain, volume DXXXIV, page 327
Mon tour de piste dans la peau d’un mortel s’est terminé brutalement au beau milieu d’un camp de chasseurs. Nous étions partis dix pour traquer ce que nous pensions être une bête enragée qui ravageait la région. Pas un seul instant n’avons-nous pensé que c’était nous les proies. J’ai été le dernier à être sacrifié. Sans le savoir, à l’époque, je venais d’être converti par la morsure d’un zélote du Conclave. Pendant les deux mois qui suivirent, les effets s’aggravèrent. Mon corps devint un tombeau. La conversion vampirique fut complétée dans la nuit de Noël 1635. J’aurais bien voulu mourir, mais j’ai réalisé que c’était impossible. La morsure qui avait ancré mon âme dans le sang me retenait sur Terre sans que je puisse franchir la mort. J’étais dans les limbes. Je dérivais comme une flamme au plus profond des ténèbres. Seule la soif vampirique me reliait encore au monde des mortels.
À mon insu, j’avais été choisi. On me fit vite comprendre comment le monde tournait chez les vampires. Le Conclave vampirique m’offrait gouvernance occulte sur la colonie qu’il désirait implanter en Amérique du Nord. Les alliances que j’avais contractées de mon vivant avec les tribus des Hurons, des Algonquins et des Montagnais les intéressaient au plus haut point. Le Conclave cherchait à profiter de mon expertise pour les aider à unir sans esclandres les clans de Wendigos qui rôdaient dans les forêts. Le but poursuivi à travers ces ententes s’imbriquait dans leur stratégie à long terme. J’acceptai donc de devenir Ministre occulte de la Nouvelle-France sous l’autorité des Ombres demeurées sur le Vieux Continent.
(Lire l’article complet dans l’édition #164 juin/juillet 2019 – www.boutiquesummum.com)